Depuis la rentrée de septembre 2021, l’on compte plus de 3 400 grossesses survenues dans les écoles de Côte d’Ivoire. Un chiffre inquiétant du ressort du Conseil national des droits de l’homme après une enquête dans les 31 régions du pays.
S’il est vrai que la problématique des jeunes mamans en milieu scolaire n’a rien de nouveau en Cote d’Ivoire, le Conseil national des droits de l’homme constate cependant une augmentation des cas, qui concernent généralement les élèves dès l’âge de 10 ans sachant que les chiffres du district d’Abidjan n’ont pas été comptabilisés dans ces 3 400 mamans mineures que dénombre l’organisation.
Une grossesse précoce peut avoir des conséquences néfastes dans la vie d’une fille. La preuve, au dernier étage d’un immeuble du quartier Yopougon Maroc, une quarantaine de jeunes femmes, pour certaines majeures depuis peu, racontent comment leur vie a basculé après qu’elles aient contracté une grossesse précoce. Ainsi, très souvent, les enfants ne sont jamais loin, titubant joyeusement sur le carrelage ou tétant le sein de leur maman. Il faut songer à faire face à ce phénomène. L’association Pro-Kids prend déjà le taureau par les cornes en organisant une réunion de « savoir-être » pour renforcer la résilience de ces jeunes mères, généralement âgées de 14 à 25 ans.
L’une des jeunes filles se retrouvant dans cette situation est Grâce. Tombée enceinte en classe de 3e. Sa grossesse à risque l’a obligée à quitter l’école il y a quatre ans, pour s’occuper de sa fille : « J’avais très peur de mon papa. Il me disait même d’interrompre la grossesse. Maman lui a parlé et moi aussi, je lui ai parlé. Pendant trois ans, je n’ai rien fait, j’étais à la maison. Je faisais la cuisine pour tout le monde ».
Malgré tout, Grâce a encore la chance de pouvoir s’affirmer positivement dans la société même si son petit ami l’a délaissée. Elle suit désormais une formation d’aide-soignante et peut compter sur l’aide de sa famille, ainsi que sur « Maman Aïcha », le petit nom donné à Aïcha Traoré, la présidente-fondatrice de Pro-Kids.
Pour la militante, ces grossesses non désirées sont la conséquence de l’absence d’un véritable programme d’éducation à la santé sexuelle : « Je veux sensibiliser 1 000, 2 000 filles, pas une. Si chaque fois je peux suivre 500 filles, c’est déjà bien pour pouvoir dire à l’État à la fin de l’année : sur 500 filles, on a eu deux grossesses. Il faut qu’il y ait une stratégie nationale qui nous ramène à l’efficacité ».
Créé en 2017, Pro-Kids a déjà permis la formation professionnelle de 350 jeunes mères, dont la moitié ayant quitté les bancs de l’école suite à une grossesse.
Au cours de l’année 2020-2021, 5 833 cas de grossesses avaient été dénombrés par le ministère de l’Éducation nationale. Le cycle primaire et secondaire sont particulièrement touchés par ce phénomène avec les mutations de la société, ils sont de plus en plus précoces et sexuellement, actifs. Il faut dire que plusieurs facteurs sont à l’origine de la montée de ce phénomène. On peut citer entre autres la rupture sporadique des actions liées au planning familial, le manque d’occupations saines certainement des enfants durant les vacances et les congés scolaires, l’ignorance, les violences basées sur le genre et l’effondrement de la cellule familiale en général qui pose de réels problèmes d’encadrement de suivi des enfants à la maison. L’État doit renforcer les programmes de santé et de reproduction, favoriser l’accès aux contraceptifs pour mieux protéger les jeunes filles.