« Quelques-uns parmi eux savent déjà faire des petites opérations, des petits calculs et des lectures qui combinent seulement deux syllabes. La plupart d’entre eux sont au niveau, mais il faut travailler avec certains qui sont en retard », laisse entendre Jongyang professeur bénévole avec une baguette en main. Il donne des instructions dans une salle de classe spartiate, située au milieu d’un campement nomade. Son matériel est constitué d’une simple natte au sol, d’une bâche contre le soleil et d’un tableau noir posé sur un arbre.
Le souci de Jongyang est de se faire comprendre par ses interlocuteurs, environ une quarantaine d’enfants qui pour la plupart marquent leurs premiers pas à l’école. Ainsi, il mélange l’arabe et le français.
Le programme des cours est étalé sur cinq jours du lundi au vendredi. Cette école fait déjà naître de l’espoir chez certains enfants au point d’en dégager des vocations. « Je préfère la lecture avec le livre à l’école. Quand je serai grand je veux être ministre ». « Moi, je veux devenir docteur, je veux soigner nos parents sur le camp. »
Le lancement des activités a eu lieu en 2019 sous l’égide de Léonard Gamaïgué, un jeune diplômé de l’enseignement. L’initiative naît de l’oisiveté des enfants des nomades qui passaient tout leur temps à jouer au bord de la route, d’autres s’occupant des animaux. C’est ainsi que Jongyang a décidé de mettre ce temps à profit. Seulement tout n’était pas facile au début.
« Au début, c’était un peu compliqué parce qu’ils étaient réticents. Avant moi, plusieurs promesses d’école ont été faites et ça n’est jamais arrivé. C’est seulement le jour où je suis venu déposer le tableau ici qu’ils ont vu que j’étais sérieux. Malgré cela, il y avait encore un peu de réticence, de voir l’école comme une perte de temps. Mais je crois que maintenant, plus aucun parent ici ne voudrait pas que son enfant vienne apprendre. »
Il faut cependant signaler qu’aujourd’hui l’élevage n’est pas prometteur dans cette localité car les troupeaux meurt à chaqu’instant laissant le doute planer sur l’avenir de l’activité. Ainsi plusieurs personnes comptent s’accrocher sur l’école pour s’affirmer positivement dans la société et c’est le cas de ce papa, Issa Dagam, qui laisse trois de ses enfants aller en classe : « Je n’ai pas été à l’école, j’ai toujours suivi mes parents avec les troupeaux. Mais aujourd’hui, nos troupeaux meurent. On est au chômage. J’espère que mes enfants feront des études. Ils pourront choisir un métier et jouer un rôle plus important que le nôtre dans notre société ».
Reste encore que cette école soit reconnue officiellement par les autorités, ce qui explique le manque de financement, principal obstacle. Selon plusieurs informations, seulement 2 % d’enfants des nomades sont inscrits à l’école au Tchad.