Près d’un tas de fruits de palmier attendant d’être écrasés, Micah Ojo, un fermier nigérian, aimerait tirer profit de la volonté du gouvernement du Nigeria de redonner vie à son industrie de l’huile de palme, autrefois florissante.
Empêtré, depuis la chute des cours de l’or noir en 2016, dans une crise économique qu’a encore aggravé la pandémie de coronavirus, le géant d’Afrique doit diversifier son économie et créer des emplois pour ses plus de 200 millions d’habitants.
Premier producteur de pétrole d’Afrique et première économie du continent en termes de PIB, le Nigeria a donc décidé d’investir massivement dans l’huile de palme, dont il était le principal producteur mondial dans les années 1960.
Cinquième producteur mondial de nos jours, il importe près de la moitié des 2 millions de tonnes consommées annuellement dans le pays, faisant fondre encore les réserves de changes déjà entamées par les chutes des cours du brut.
Mais Micah Ojo, qui cultive l’une des petites plantations qui parsèment l’Etat d’Akwa Ibom et d’autres Etats du sud du Nigeria, où les rangées de palmiers à huile bordent les routes malgré l’abandon de nombreuses usines, se plaint de ne pas bénéficier des prêts accordés par le gouvernement via la Banque centrale aux grosses exploitations et aux investisseurs.
Petits producteurs en difficulté
Dans l’Etat d’Edo, les palmiers et hévéas de l’Okumu Oil Palm Company s’étendent sur plus de 33 000 hectares de terres.
Des plantations en partie financées par un prêt de 14 milliards de nairas (29 millions d’euros), contracté dans le cadre des différents plans de développement lancés ces dernières années par le gouvernement, pour l’achat de nouveaux plants de meilleure qualité et pour aider les producteurs à développer de nouvelles plantations et usines.
Fondée en 1976, Okomu produit 40 000 tonnes d’huile de palme brute (CPO) par an et espère doubler sa production à l’horizon 2025, avec la mise en service de deux nouvelles usines d’ici à l’an prochain.
Mais le manque d’infrastructures, l’état lamentable des routes et les coupures incessantes d’électricité, freinent le développement de ce secteur, comme de nombreux autres au Nigeria.
L’industrie de l’huile de palme est sous le feu des critiques à travers le monde, accusée notamment de contribuer à la déforestation ou à la disparition des terres communautaires pour une agriculture de subsistance. Ses partisans affirment au contraire qu’elle contribue au développement local et crée des emplois.
Dans l’Etat d’Akwa Ibom, les autorités disent utiliser un prêt de la Banque centrale pour réhabiliter les plus de 3 000 hectares d’une plantation de palmier à huile abandonnée depuis plus de trente ans et comptant 200 000 palmiers et une pépinière d’une capacité de 300 000 plants.
Micah Ojo, lui, emploie désormais 30 personnes, contre cinq quand il s’est lancé. Mais il a besoin de nouveaux fonds pour pouvoir cultiver 150 ha supplémentaires, disponibles sur son terrain.
Devenir plus compétitifs
Les petits producteurs, qui représentent 70 % de la production selon M. Hefer, se disent exclus des aides financières de la Banque centrale. « Les banques n’acceptent de prêter qu’aux grands producteurs, déjà établis, qui disposent déjà de sources de revenus importantes, explique un représentant du Forum des propriétaires de plantations du Nigeria, qui rassemble des acteurs du secteur. Ces entreprises sont, pour la plupart, des multinationales. Les petits producteurs que les programmes sont censés cibler n’y ont pas accès. »
Selon l’association, qui a appelé le gouvernement et les bailleurs à accorder aux petits producteurs des prêts à des conditions avantageuses, il faut entre 3 800 et 4 800 euros, ainsi qu’un minimum de trois ans pour développer un seul hectare de palmier à huile.
Les petits producteurs souhaitent en outre que l’Institut nigérian de recherche sur le palmier à huile (Nifor), géré par l’Etat, les aide à améliorer les semis ou à lutter contre les parasites et les maladies, pour espérer devenir plus compétitifs.